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Nos systèmes d’approvisionnement en eau et d’évacuation des eaux usées sont constamment mis à l’épreuve. Des tempêtes de plus en plus violentes et imprévisibles peuvent submerger les infrastructures, et entraîner l’écoulement d’eaux usées brutes dans les rivières et les lacs. De meilleurs systèmes de surveillance permettront de prendre rapidement les mesures qui s’imposent pour garantir le maintien de la qualité de l’eau et la protection des citoyens.
Le projet DWC, financé par l’UE, a démontré que l’exploitation de technologies numériques intelligentes pouvait permettre une surveillance de l’eau plus efficace et plus opportune. Avant le projet, l’adoption de ces technologies avait été limitée par le manque d’études de rentabilité viables et de preuves concrètes de leur efficacité.
Démontrer la valeur ajoutée de la numérisation
Le projet a réuni cinq grandes villes européennes (Berlin, Copenhague, Milan, Paris et Sofia) pour y tester de nouvelles solutions de surveillance. «Ces villes sont toutes confrontées à différents défis», explique le coordinateur du projet, Nicolas Caradot, du Kompetenzzentrum Wasser Berlin, en Allemagne. «Notre idée était d’identifier et de développer des solutions qui répondent à leurs problèmes spécifiques.»
L’un des principaux problèmes des centres-villes dotés d’une infrastructure plus ancienne est le fait que les réseaux d’égouts et d’évacuation des eaux pluviales sont souvent combinés. Les eaux usées peuvent par conséquent se déverser dans les rivières durant les orages, comme cela a été le cas lors des Jeux olympiques de Paris, lorsque des épreuves de natation dans la Seine ont dû être reportées pour cause de contamination de l’eau.
Les principaux enjeux dans les villes qui ont pris part au projet étaient notamment la nécessité d’une meilleure gestion des flux du réseau d’égouts pendant les tempêtes, la surveillance de la qualité de l’eau des rivières, l’optimisation des coûts opérationnels et des investissements de maintenance, ainsi que le traitement sûr et la réutilisation des eaux usées municipales pour l’irrigation des terres agricoles.
«Il s’agit des principaux défis que nous avons identifiés», explique Nicolas Caradot. «Nous avons ensuite réuni 15 innovateurs et travaillé à l’élaboration de solutions numériques. Celles-ci ont été testées dans au moins une de nos villes. Notre objectif était de démontrer concrètement la valeur ajoutée de la numérisation.»
Tests réussis des systèmes automatisés
Parmi les solutions testées avec succès figure un système de capteurs qui informe presque immédiatement les opérateurs d’un risque de contamination de l’eau. Le système de capteurs a été testé dans la Seine à Paris, ainsi qu’à Berlin et à Milan.
«Auparavant, il fallait apporter un échantillon au laboratoire et attendre 24 heures pour obtenir un résultat», ajoute Nicolas Caradot. «Cette technologie réduit le délai d’attente à seulement quelques heures, et ce directement sur place.»
Les méthodes de laboratoire standard souffrent de leur incapacité à mesurer avec précision les concentrations bactériennes dans les eaux urbaines. Ils ne conviennent par conséquent pas à l’évaluation des risques microbiologiques dans les zones touchées par la pollution des eaux usées urbaines.
Le nouveau capteur résout ce problème en fournissant à la fois une numération des bactéries planctoniques (flottant librement) et une numération complète des bactéries fécales indicatrices (y compris celles agrégées sur les particules fécales), ce qui permet des évaluations du risque plus précises et une meilleure protection de la santé publique.
L’équipe du projet a également développé un système d’alerte précoce basé sur l’apprentissage automatique afin d’améliorer la gestion des eaux de baignade. Le système a pu prévoir la qualité de l’eau quelques jours à l’avance avec un niveau de précision de 95 %, et fournir une alerte précoce concernant la dégradation de la qualité de l’eau. «Nous avons recueilli diverses données relatives à des facteurs tels que les précipitations, les flux d’eaux usées et la qualité du traitement, et nous avons appliqué un algorithme d’apprentissage automatique pour prévoir la qualité de l’eau, limitant le besoin de mesures physiques», explique Nicolas Caradot.
Nous avons également développé une solution de surveillance peu coûteuse du réseau d’égouts afin de permettre aux opérateurs des services publics de surveiller un grand nombre d’exutoires de débordement des égouts combinés. Nous avons en outre développé des capteurs afin de résoudre les problèmes de connexion entre les réseaux d’égouts et les réseaux d’eaux pluviales.
Contribuer à l’élaboration des futures politiques
Depuis l’achèvement du projet, les outils développés dans le cadre de celui-ci ont déjà été exploités en Europe. Il s’agit notamment d’un système d’alerte précoce, actuellement utilisé en Italie, pour une réutilisation sûre de l’eau en agriculture. Un système d’aide à la décision reposant sur des algorithmes pour une meilleure gestion des eaux pluviales est désormais opérationnel à Copenhague.
«Ce projet a également permis de développer un certain nombre de solutions innovantes qui n’étaient pas prêtes à être commercialisées, mais présentaient néanmoins un fort potentiel», souligne Nicolas Caradot. «Il s’agit notamment des capteurs enzymatiques pour la surveillance de la qualité de l’eau et du système d’alerte précoce basé sur l’apprentissage automatique concernant la qualité des eaux de baignade.»
Nicolas Caradot et son équipe sollicitent actuellement de nouveaux financements de l’UE. L’objectif est d’intégrer ces deux innovations (les capteurs de qualité de l’eau et la modélisation informatique) afin de commercialiser un outil combiné. «Nous envisageons également de les appliquer à d’autres domaines, tels que l’aquaculture, l’agriculture et la protection de l’eau potable», ajoute-t-il.
Le projet DWC a également travaillé en étroite collaboration avec d’autres initiatives financées par l’UE, notamment SCOREwater et Fiware4Water, afin de garantir un impact durable sur la surveillance de la qualité de l’eau en Europe. Ce projet a également débouché sur la publication d’une note d’orientation qui identifie les lacunes législatives et propose des recommandations clés. «Il s’agit d’un document de référence, non seulement pour nous, mais aussi pour d’autres chercheurs et décideurs politiques», déclare Nicolas Caradot. «L’objectif est de contribuer à l’élaboration des futures politiques.»